La coordination des politiques au niveau mondial reste essentielle pour préserver l'économie mondiale face à l'évolution de la structure des échanges, à l'explosion de la dette et à la crise climatique qui frappe durement les pays en développement.
ONU commerce et développement met en garde contre un nouveau ralentissement de la croissance en 2024, en invoquant la baisse des investissements et le ralentissement de la dynamique du commerce mondial.
La perspective d'une baisse des taux d'intérêt pourrait améliorer les perspectives budgétaires des gouvernements et des entreprises, mais la politique monétaire ne peut à elle seule résoudre tous les problèmes mondiaux urgents.
Les stratégies visant à relancer l'investissement et le commerce, à soutenir le plein emploi et une répartition équitable des revenus sont essentielles pour stimuler une croissance robuste et atteindre les Objectifs de développement durables.
Bien que le ralentissement de l'économie mondiale en 2023 ait été moins grave que prévu, ONU commerce et développement, dans son dernier rapport, prévient qu'une nouvelle décélération de la croissance pourrait être attendue cette année.
Rebeca Grynspan, Secrétaire générale d’ONU commerce et développement, avant les réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale auxquelles elle participera, a vivement recommandé une action multilatérale concertée et un dosage équilibré des politiques. Elle souligne aussi que la coordination des politiques au niveau international reste la clé de la sauvegarde de l'économie mondiale dans un contexte de modification des structures commerciales, d'envolée de la dette et d'augmentation du coût du changement climatique, autant de facteurs qui affectent de manière disproportionnée les pays en développement.
À l'horizon 2024, les attentes des marchés en matière de baisse des taux d'intérêt permettent d'espérer une atténuation de la pression sur les budgets privés et publics dans le monde entier.
Toutefois, la politique monétaire ne peut à elle seule apporter des solutions aux principaux défis mondiaux, indique le rapport, rappelant les crises actuelles liées à la dette souveraine, aux inégalités croissantes et au changement climatique.
ONU commerce et développement souligne la nécessité d'une action multilatérale concertée, ainsi que d'un dosage équilibré de mesures fiscales, monétaires, de stimulation de la demande et de l'investissement pour parvenir à la viabilité financière, créer des emplois et améliorer la répartition des revenus.
Pour rétablir la confiance dans le système multilatéral et éviter de nouvelles fractures, la Secrétaire générale de Nations unies commerce et développement, Mme Grynspan, met l'accent sur deux domaines essentiels.
« Nous appelons à des efforts multilatéraux coordonnés pour remédier aux asymétries du commerce international et à la concentration des marchés », a-t-elle déclaré. « Les pays emprunteurs ont besoin d'une plus grande flexibilité fiscale pour atteindre les Objectifs de développement durable. Cela ne peut se faire que par une réforme globale et inclusive du filet de sécurité financier mondial. »
Les salaires réels restent inférieurs aux niveaux pré-pandémie
La plupart des banques centrales des économies avancées ont relevé leurs taux d'intérêt de manière agressive depuis le début de l'année 2022 pour lutter contre l'inflation. Toutefois, cette approche n'a pas pleinement pris en compte les problèmes liés à la chaîne d'approvisionnement pendant le COVID-19 et au pouvoir de marché accru des firmes multinationales, ce qui a entraîné une hausse des prix et des bénéfices.
En 2023, malgré la stabilité de l'emploi, l'inflation a diminué, ce qui indique que les problèmes liés principalement à l'offre, et non la demande, ont contribué à l'accélération de l'inflation. Le rapport n'a pas non plus trouvé de preuve d'un cycle redouté où la hausse des salaires entraîne une hausse des prix (et vice versa), les salaires réels étant toujours inférieurs aux niveaux d'avant la pandémie et à la traîne par rapport à la croissance de la productivité.
La spirale salaires-prix ne s'est pas matérialisée, mais la productivité du travail a généralement dépassé la croissance des salaires réels
La montée du protectionnisme, la perturbation des routes maritimes due aux tensions géopolitiques et au changement climatique menacent le commerce mondial
En 2023, l'économie mondiale a progressé de 2,7 %, mais le commerce international de marchandises a diminué d’environ 1 %. Malgré une certaine reprise en 2024, il est peu probable que le commerce de marchandises soit un moteur important de la croissance cette année.
Les routes maritimes mondiales, cruciales pour le commerce international, sont confrontées à des défis croissants. Plus récemment, l'escalade des attaques contre les navires en mer Rouge depuis novembre 2023 a aggravé les perturbations déjà existantes en mer Noire, causées par la guerre en Ukraine. En outre, la sécheresse induite par le climat affecte le commerce par le Canal de Panama.
Malgré une certaine amélioration, le commerce mondial de marchandises ne devrait connaître qu’une croissance modérée cette année. Les perspectives pour le commerce des services sont relativement meilleures.
Le rapport met également en garde contre la montée du protectionnisme, les tensions commerciales et l'incertitude géopolitique. Ces risques n'entravent pas seulement les économies, mais mettent également en péril les solutions multilatérales concertées à un moment où la collaboration commerciale internationale est plus que jamais nécessaire.
Réformer l'architecture de la dette mondiale
De nombreux pays en développement sont aux prises avec d'importants problèmes de dette et de développement à un moment où les flux d'aide diminuent.
En 2022, près de la moitié des pays en développement étudiés pour lesquels des données sont disponibles ont connu des transferts nets négatifs quant à leur dette publique et la dette garantie par leur État. Les sorties de fonds vers les créanciers extérieurs, soient les prêteurs bilatéraux, multilatéraux et privés pris dans leur ensemble, ont dépassé les décaissements de près de 50 milliards de dollars, un montant équivalent au PIB de plusieurs pays combinés.
En outre, les créanciers privés en particulier se sont montrés moins intéressés par les prêts aux pays en développement. Entre 2021 et 2022, les transferts nets des créanciers privés sur la dette publique et la dette garantie par l'État sont passés d'un flux entrant de plus de 40 milliards de dollars à un flux sortant de près de 90 milliards de dollars, ce qui met en évidence les failles de l'architecture financière et de la dette actuelle.
La crise de la dette draine de précieuses ressources publiques des pays en développement
Même si certains pays en développement ont enregistré de fortes émissions d'obligations au cours des premiers mois de 2024, l'accès au marché reste inégal et coûteux.
Bien que les rendements obligataires aient récemment baissé, les coûts de refinancement dans les pays en développement restent préjudiciables à la dynamique de la dette
La crise actuelle de la dette est enracinée dans des questions structurelles, découlant d'une croissance économique lente, de l'évasion fiscale généralisée, de la dépendance à l'égard des produits de base et du coût du changement climatique.
Nations unies commerce et développement appelle à un renforcement du filet de sécurité financier mondial et à la mise en place de cadres multilatéraux efficaces pour résoudre les problèmes liés à la dette souveraine.
Les prix des denrées alimentaires continuent d'augmenter dans les pays en développement, au détriment des ménages à faible revenu
Conformément au cycle mondial des produits de base, les prix des denrées alimentaires mesurés en dollars ont partiellement baissé, mais les prix domestiques continuent d'augmenter dans de nombreux pays en développement, aggravant la crise du coût de la vie à laquelle sont confrontés les ménages à faible revenu.
Le Rapport sur le commerce et le développement identifie plusieurs facteurs contribuant à la hausse des prix alimentaires mondiaux et aussi aux préjudices des producteurs des pays en développement. Ces facteurs comprennent la concentration importante au sein des chaînes de valeur alimentaires mondiales, les normes plus strictes imposées par les pays importateurs sur les produits alimentaires et l'influence croissante de la finance sur les marchés des produits de base.
L'insécurité alimentaire reste une préoccupation majeure dans les pays en développement. Si les tendances actuelles persistent, quelque 600 millions de personnes seront chroniquement sous-alimentées d'ici 2030, selon les projections de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture.