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Le commerce maritime sous pression : croissance ralentie en 2025

24 septembre 2025

Le transport maritime mondial fait face à une croissance fragile, à la hausse des coûts et à une incertitude croissante, alors que les tensions politiques, l’évolution des échanges et la reconfiguration des routes redessinent le commerce maritime.

Maritime trade under pressure: Growth set to stall in 2025

Le transport maritime, qui achemine plus de 80 % du commerce mondial, est sous une forte pression. Après une croissance modeste de 2,2 % en 2024, le commerce maritime devrait ralentir à seulement 0,5 % en 2025, selon l’Étude sur les transports maritimes 2025 d’ONU commerce et développement (CNUCED), publiée le 24 septembre.

Des distances plus longues et des routes en mutation

Les tensions politiques, les changements dans les schémas commerciaux et la reconfiguration des voies maritimes transforment la géographie du commerce.

Les navires qui traversaient autrefois la mer Rouge en quelques jours mettent désormais des semaines à contourner le cap de Bonne-Espérance. Les taux de fret sont élevés et volatils, les chaînes d’approvisionnement fragiles et les perturbations portuaires deviennent chroniques.

Le réacheminement des navires a fait grimper les tonnes-milles (la distance parcourue par chaque tonne de cargaison) à un niveau record de 6 % en 2024, soit près de trois fois plus vite que la croissance du volume des échanges. En mai 2025, le tonnage transitant par le canal de Suez restait inférieur de 70 % aux niveaux de 2023, tandis que le détroit d’Ormuz – par lequel passent 11 % du commerce mondial et un tiers du pétrole transporté par mer – demeurait exposé à des risques de perturbation.

Maritime cargo rerouted: Distances grow faster than volumes

Des mesures politiques annoncées par les États-Unis et plusieurs partenaires commerciaux, dont de nouveaux droits de douane et frais portuaires visant certains navires construits ou exploités à l’étranger, ajoutent encore aux coûts et à l’incertitude.

Le transport de l’énergie est aussi en transition : celui du charbon a augmenté malgré son déclin à long terme, celui du pétrole est resté stable mais sur des trajets plus longs, et le commerce du gaz s’est accru. Les minerais critiques – essentiels pour les batteries, les énergies renouvelables et l’économie numérique – deviennent une nouvelle source de tension, la concurrence pour sécuriser les approvisionnements et générer de la valeur ajoutée au niveau national imposant de nouvelles exigences en matière de transport et de logistique.

Critical minerals on the move: Rising demand boosts maritime trade

Une nouvelle normalité : la volatilité des taux de fret

La volatilité des taux de fret est devenue la nouvelle norme. Les taux de fret des conteneurs, du vrac et des pétroliers sont restés élevés et instables en 2024 et 2025, oscillant fortement sous l’effet des tensions géopolitiques, des changements de politiques commerciales et des déséquilibres entre l’offre et la demande.

Le transport de conteneurs a été particulièrement touché. Les taux spot et d’affrètement se sont rapprochés des sommets atteints pendant la COVID-19 à la mi-2024 avant de reculer, mais en restant largement supérieurs aux niveaux d’avant-crise. L’Indice des taux de fret en conteneurs de Shanghai a atteint en moyenne 2 496 points en 2024, soit une hausse de 149 % par rapport à 2023, avec des taux spot de juillet culminant à 3 600 dollars par conteneur.

Volatile seas: Container freight rates surge and fluctuate amid disruptions

Les taux du vrac sec ont bondi en 2024 grâce à la forte demande en charbon, céréales et engrais, au réacheminement par la mer Rouge et à une croissance limitée de la flotte, avant de s’assouplir en 2025 avec l’arrivée de nouvelles capacités. Les marchés des pétroliers ont connu une flambée en juin 2025 en raison de risques accrus dans le détroit d’Ormuz.

Tanker market turbulence: Freight rates swing sharply in 2024 and 2025

Le maintien de coûts de transport élevés risque de frapper plus durement les pays en développement, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays les moins avancés (PMA).

Des émissions en hausse avec l’allongement des routes

Des routes plus longues entraînent aussi plus d’émissions. Les émissions de gaz à effet de serre du transport maritime ont augmenté de 5 % en 2024. Seuls 8 % du tonnage de la flotte mondiale sont équipés pour utiliser des carburants alternatifs, et les taux de recyclage des navires restent faibles.

Rerouting’s climate cost: Longer routes increase carbon emissions

Le cadre « zéro émission nette » de l’Organisation maritime internationale, dont l’adoption doit être examinée en octobre 2025, fixerait la trajectoire vers la neutralité carbone à l’horizon 2050 en instaurant une norme mondiale de carburant et un mécanisme de tarification du carbone pour le transport maritime international. Les recettes générées pourraient contribuer à financer une transition juste, notamment pour les PEID et les PMA.

Le rapport de la CNUCED avertit que la décarbonation du transport maritime entraînera des coûts importants, notamment pour le renouvellement de la flotte, l’adaptation des ports et le développement d’infrastructures pour les carburants alternatifs. Des signaux réglementaires clairs, davantage d’investissements et une coopération accrue entre gouvernements, industrie et acteurs financiers seront essentiels pour mener cette transition.

L’adaptation doit être gérée, inclusive et durable

D’autres transitions profondes transforment également le secteur, notamment l’automatisation et la numérisation, qui promettent des gains d’efficacité mais augmentent les risques de cybersécurité.

Le transport maritime a déjà surmonté bien des tempêtes, mais jamais autant de transitions à la fois. Le secteur s’adaptera. La question est de savoir si cette adaptation sera gérée ou chaotique, inclusive ou exclusive, durable ou simplement survivante.

Le rapport identifie plusieurs priorités, parmi lesquelles :

  • Stabiliser les politiques commerciales pour réduire l’incertitude et maintenir la fluidité des chaînes d’approvisionnement.
  • Investir dans des infrastructures durables, écologiques et résilientes pour les ports et le transport maritime.
  • Promouvoir la numérisation du secteur pour accroître l’efficacité et la transparence, tout en garantissant la cybersécurité.
  • Accélérer le renouvellement et la modernisation de la flotte afin d’atteindre les objectifs climatiques et de promouvoir un recyclage durable des navires.
  • Protéger les économies vulnérables contre les effets les plus sévères de la hausse des coûts du transport maritime.