Le commerce mondial connaît une reprise fragile au troisième trimestre, mais l’avenir reste incertain
Le commerce mondial a enregistré une baisse de 5 % au troisième trimestre 2020 par rapport à la même période l'année dernière, selon le nouveau Global Trade Update de la CNUCED publié le 21 octobre.
En amélioration par rapport à la chute de 19 %, en glissement annuel, enregistrée au deuxième trimestre, la CNUCED s'attend à ce que cette reprise fragile se poursuive au quatrième trimestre 2020, et avance une première estimation à -3 % par rapport au dernier trimestre de 2019.
En fonction de l'évolution de la pandémie de COVID-19 pendant les mois d'hiver, l'organisme des Nations Unies pour le commerce et le développement prévoit une contraction de la valeur du commerce mondial de 7 à 9 % par rapport à 2019.
« L’incertitude quant à l'évolution de la pandémie aggravera encore les perspectives commerciales dans les mois à venir », a déclaré le Secrétaire Général de la CNUCED, Mukhisa Kituyi.
« Il y a bien quelques résultats positifs ici et là, mais nous ne pouvons pas exclure un ralentissement de la production dans certaines régions, ni une augmentation soudaine des politiques commerciales restrictives ».
Malgré un résultat en baisse de 7 à 9 % cette année, M. Kituyi a souligné qu'il s'agit d'un résultat bien plus encourageant que ce qui avait été anticipé en juin, lorsque la CNUCED annonçait une baisse de 20 % en 2020, en glissement annuel.
Depuis lors, les tendances commerciales se sont améliorées principalement grâce à la reprise plus rapide que prévue des activités économiques en Europe et en Asie de l'Est.
Reprise notable en Chine
La Chine, en particulier, a relancé son économie beaucoup plus tôt que prévu et le rapport souligne la reprise marquée de ses échanges commerciaux.
Les exportations chinoises, après avoir chuté dans les premiers mois de la pandémie, se sont stabilisées au deuxième trimestre 2020 et ont fortement rebondi au troisième trimestre, avec des taux de croissance de près de 10 % en glissement annuel.
« Dans l'ensemble, le niveau des exportations chinoises pour les neuf premiers mois de 2020 était comparable à leur niveau de 2019 sur la même période », indique le rapport.
La demande chinoise de biens et de services s'est redressée après le déclin du deuxième trimestre. Contrairement aux autres grandes économies, ses importations se sont stabilisées en juillet et août, puis ont connu une croissance substantielle de 13 % en septembre.
Une croissance des exportations a également été enregistrée en septembre en Inde (4 %) et en Corée du Sud (8 %).
À partir de juillet, la chute des échanges a été significative dans la plupart des régions, à l'exception de l'Asie de l'Est. Mais la plus forte baisse a été ressentie par les régions d'Asie de l'Ouest et du Sud, où les importations ont chuté de 23 % et les exportations de 29 %.
Les chiffres de juillet constituent toutefois une amélioration par rapport à la baisse de 35 % des importations et de 41 % des exportations telles que relevées au deuxième trimestre.
Figure 1 : Le commerce a chuté de façon spectaculaire dans la plupart des régions, sauf en Asie de l’Est et dans le Pacifique
Le commerce Sud-Sud montre une plus grande résilience
Les pays en développement et les pays développés ont connu le même déclin brutal et généralisé de leurs échanges internationaux au deuxième trimestre 2020. Mais les exportations des économies en développement semblent se redresser plus rapidement.
En glissement annuel, la croissance des exportations des pays en développement s'est améliorée, passant de -17 % au deuxième trimestre à -6 % en juillet, tandis que celles des pays développés sont passées de -22 % à -14 %.
Les échanges Sud-Sud - le commerce entre pays en développement - ont fait preuve d'une certaine résistance, le recul en glissement annuel s'établissant à 8 % en juillet, contre 16 % au deuxième trimestre.
Le commerce de produits médicaux en lien avec la COVID-19 profite aux riches
L'évaluation du commerce dans différents secteurs (voir graphique) montre que les industries de l'énergie et de l'automobile ont été les plus durement frappées par la pandémie. En revanche, grâce au télétravail et aux mesures de protection personnelle, on assiste à une forte croissance dans de secteurs tels que les équipements de communication, les machines de bureau, le textile et l'habillement.
Figure 2 : Commerce mondial par secteur
Ici l'analyse de la CNUCED accorde une attention particulière aux fournitures médicales destinées à la lutte contre la COVID-19, à savoir les équipements de protection individuelle, les désinfectants, les kits de diagnostic, les respirateurs à oxygène et autres types d’équipements hospitaliers.
Le rapport montre que les exportations de fournitures médicales permettant de lutter contre la COVID-19 en provenance de Chine, de l'Union européenne et des États-Unis sont passées d'environ 25 milliards de dollars à 45 milliards de dollars par mois entre janvier et mai 2020. Et depuis avril, le commerce de ces produits a augmenté en moyenne de plus de 50 %.
Cependant, l'augmentation de ce commerce a surtout bénéficié aux économies les plus riches, les pays à revenu moyen et faible étant largement exclus de l'accès aux fournitures pour lutter contre la COVID-19.
Depuis le début de la pandémie, chaque résident de pays à revenu élevé a bénéficié en moyenne de 10 dollars supplémentaires par mois d'importations de produits liés à la COVID-19, contre seulement 1 dollar pour les personnes vivant dans les pays à revenu moyen et 0,10 dollar pour celles des pays à faible revenu.
Cela signifie que les importations par habitant de produits médicaux essentiels pour lutter contre la pandémie ont été environ 100 fois plus élevées dans les pays riches que dans les pays pauvres.
Figure 3 : Variation moyenne d'une année à l'autre des importations par habitant de fournitures médicales liées à la COVID-19
« Même s’il faut s'attendre à ce que l'augmentation des importations de produits contre la COVID-19 par habitant soit plus importante dans les pays riches, cette différence est stupéfiante », indique le rapport.
La CNUCED avertit que lorsqu’un vaccin contre la COVID-19 sera disponible, les inégalités d’accès à celui-ci entre les habitants des pays riches et des pays pauvres pourraient être encore plus marquées.
Si certains pays à faible revenu ont la capacité de fabriquer localement certains équipements de protection, cela pourrait ne pas être le cas pour la fabrication de vaccins, qui nécessitent des capacités de fabrication et de logistique spécifiques.
Le rapport appelle donc les gouvernements, le secteur privé et les organisations philanthropiques à poursuivre leur mobilisation de fonds pour lutter contre la pandémie de COVID-19 dans les pays en développement et à soutenir les mécanismes financiers, tels que l'initiative mondiale COVAX, pour fournir des vaccins contre la COVID-19 qui soient sûrs et efficaces, et de manière équitable jusque dans les pays pauvres.