Les perturbations mettent à rude épreuve les chaînes d'approvisionnement, augmentent les coûts et bouleversent les schémas commerciaux mondiaux, avec les économies vulnérables particulièrement touchées.
Le commerce mondial est confronté à d'importantes perturbations alors que deux des points d'étranglement maritimes les plus vitaux – le canal de Suez et le canal de Panama – font face à de graves défis, causés par des tensions géopolitiques et des risques liés au climat.
En plus de mettre à mal les chaînes d'approvisionnement mondiales et de freiner la croissance économique, ces perturbations entraînent une hausse des coûts, bouleversent les schémas commerciaux, perturbent l'approvisionnement en énergie et en denrées alimentaires, et risquent d'aggraver les problèmes de sécurité alimentaire, notamment dans les économies vulnérables.
Le trafic empruntant le canal de Suez et le canal de Panama s’effondre
Le nombre de navires transitant par le canal de Suez est au plus bas. Selon les dernières données disponibles, la moyenne de 33 transits par jour à la mi-octobre 2024 était inférieure de 57 % par rapport à son dernier niveau record, 55 % inférieure par rapport à la moyenne de l’année précédente et seulement 4 % supérieur à la moyenne la plus faible enregistrée sur quatre semaines.
En revanche, le trafic du canal de Panama montre une reprise. À la mi-octobre 2024, la moyenne sur quatre semaines de 30 transits par jour était inférieure de 30 % au pic précédent et seulement 4 % en dessous de la moyenne enregistrée l'année précédente. Il est à noter que la moyenne de 30 transits par jour surpasse de 40 % le nombre de transit moyen le plus bas enregistré au début de 2024.La capacité de navire réacheminée autour du cap de Bonne-Espérance, en Afrique, a bondi de 89 %. Bien que cela maintienne le flux des marchandises, cela augmente considérablement les coûts, les retards et les émissions de carbone.
Par exemple, un grand porte-conteneurs transportant entre 20 000 et 24 000 unités équivalentes vingt pieds (EVP) sur la route Extrême-Orient–Europe entraîne un coût supplémentaire de 400 000 dollars par voyage en raison des émissions, selon le système d'échange de quotas d'émission (ETS) de l'Union européenne, lorsqu'il contourne l'Afrique plutôt que d'emprunter le canal de Suez.
Des itinéraires de navigations plus longs, des coûts plus élevés
Les itinéraires de navigation prolongés ont entraîné une augmentation de la congestion portuaire, de la consommation de carburant, des salaires des équipages, des primes d'assurance et des risques de piraterie, tout en majorant les coûts globaux et les émissions de gaz à effet de serre.
Les tonnes-milles mondiales ont augmenté de 4,2 % en 2023, accentuant la pression sur les chaînes d'approvisionnement. À la mi-2024, le détournement des navires hors de la mer Rouge et du canal de Panama a entraîné une augmentation de 3 % de la demande mondiale de navires et de 12 % pour les porte-conteneurs.
Les centres portuaires comme Singapour et les grands ports méditerranéens sont confrontés à une demande croissante de services de transbordement, ce qui accentue la congestion et les retards mondiaux.
Les économies vulnérables sont les plus touchées
Les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays les moins avancés (PMA) sont les plus touchés par ces perturbations.
Si la hausse des tarifs de transport par conteneur observée entre octobre 2023 et juin 2024 et causée par les perturbations affectant la navigation dans a mer Rouge et le canal de Panama, devait persister jusqu’à la fin 2025, les prix à la consommation mondiaux pourraient augmenter de 0,6 % d'ici la fin de l’année 2025, avec une hausse potentielle de 0,9 % dans les PEID, et une augmentation de 1,3 % des prix des denrées alimentaires transformées.
Les économies des PEID, qui dépendent fortement du transport maritime pour les importations essentielles, ont vu leur connectivité maritime diminuer de 9 % au cours des dix dernières années, ce qui les rend dix fois moins connectées aux réseaux maritimes mondiaux par rapport aux pays non PEID.
Les approvisionnements en énergie sont également menacés, car les perturbations des principales routes maritimes affectent le transport de pétrole, de gaz et d'autres produits énergétiques essentiels.
Une action rapide est nécessaire pour atténuer les vulnérabilités des points d'étranglement internationaux
En réponse à ces défis croissants, l’Étude sur les transports maritimes 2024 de l’ONU commerce et développement (CNUCED) appelle à une action rapide et coordonnée pour protéger le commerce mondial et atténuer les effets des vulnérabilités affligeant ces points d'étranglement. L'organisation met l'accent sur la nécessité de :
- Renforcer la coopération internationale et les systèmes de surveillance pour garantir des routes maritimes bien fonctionnelles, fournir des alertes précoces et permettre un redéploiement rapide et efficace des navires.
- Diversifier les routes maritimes et soutenir les initiatives de commerce régional afin de réduire la dépendance aux routes longues et de renforcer les flux commerciaux intrarégionaux.
- Investir d'urgence dans des infrastructures résilientes au niveau des points d'étranglement clés pour minimiser l'impact des risques climatiques et des conflits.
Les défis auxquels font face le canal de Suez et le canal e Panama soulignent la fragilité des chaînes d'approvisionnement mondiales face aux perturbations, notamment celles provoquées par les risques climatiques et géopolitiques croissants.
Avec plus de 80 % du commerce mondial transporté par mer, il est essentiel de renforcer la résilience des infrastructures maritimes et d'accélérer la transition vers un transport maritime à faible émission de carbone pour assurer la fluidité du transport et de l’acheminement des produits du commerce international.