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La crise socioéconomique rapproche la Palestine du point de rupture, avertit un rapport de l’ONU


Communiqué de presse
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UNCTAD/PRESS/PR/2019/024
La crise socioéconomique rapproche la Palestine du point de rupture, avertit un rapport de l’ONU

Geneva, Suisse, 10 septembre 2019

Le bras de fer budgétaire avec Israël risque d’aboutir à l’effondrement financier de la Palestine

La dégradation de l’environnement est un fardeau sanitaire pour les Palestiniens

En Palestine, les souffrances augmentent et l’économie continue de se détériorer ; la pauvreté et la situation environnementale s’aggravent, ce qui a de lourdes conséquences pour la population, selon le dernier rapport sur l’assistance de la CNUCED au peuple palestinien.

En 2018 et au début de 2019, l’économie palestinienne a stagné, le revenu par habitant a subi une nouvelle baisse de 1,7 %, le chômage et la pauvreté se sont aggravés, et le coût environnemental de l’occupation a augmenté dans le Territoire palestinien occupé (la bande de Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est).

Les perspectives économiques à court terme sont plus sombres encore, aucun signe ne permettant de penser que le déclin des principaux facteurs de croissance pourrait s’inverser dans un avenir proche.

Environ un tiers de la population active est au chômage. À Gaza, ce taux dépasse 50 % et le taux de pauvreté atteint 53 %, alors même que la plupart des personnes considérées comme pauvres reçoivent une aide des pouvoirs publics et des organisations internationales.

Dans la bande de Gaza, les conditions socioéconomiques se détériorent et rendent la situation de plus en plus invivable. En 2018, l’économie locale s’est contractée de 7 %, d’où une baisse de 10 % du revenu par habitant.

Pourquoi l’économie est-elle au bord de l’effondrement ?

Le risque d’effondrement de l’économie palestinienne tient à l’expansion et au durcissement de l’occupation, à l’asphyxie de l’économie de la bande de Gaza, à la baisse de 6 % de l’aide des donateurs en 2018, à la dégradation des conditions de sécurité et au manque de confiance qui résulte des mauvaises perspectives politiques.

L’occupation pèse sur tous les secteurs de l’économie, mais elle touche tout particulièrement l’agriculture et l’industrie manufacturière, d’où un déficit commercial énorme qui entrave la croissance. Entre 1994 et 2018, la part de l’industrie manufacturière dans le produit intérieur brut (PIB) est passée de 20 % à 11 %, pendant que celle de l’agriculture plongeait de 12 % à moins de 3 %.

La viabilité et la compétitivité de la production palestinienne sont compromises par les multiples contraintes physiques et administratives imposées par la Puissance occupante.

Rien qu’en Cisjordanie, la circulation des travailleurs et des biens palestiniens est restreinte par 705 obstacles physiques permanents − postes de contrôle, barrières, buttes, barrages routiers, tranchées, etc.

L’économie est encore affaiblie par l’interdiction d’importer toute une série de produits technologiques et intermédiaires essentiels qui figurent sur une liste de biens « à double usage » (biens civils dont Israël considère qu’ils peuvent avoir des applications militaires), ainsi que d’autres facteurs de production indispensables.

Isolement commercial

Contrainte par l’occupation de s’isoler des marchés internationaux, la Palestine est placée dans une situation de dépendance commerciale et économique excessive à l’égard d’Israël, qui représente 80% de ses exportations et 58 % de ses importations.

L’économie palestinienne pourtant modeste constitue le quatrième marché d’exportation d’Israël, directement derrière les États-Unis, la Chine et le Royaume‑Uni et devant de grandes puissances commerciales comme la France, l’Allemagne et l’Inde. Le déficit commercial qui en résulte est supérieur au montant total des exportations palestiniennes.

Selon le rapport de la CNUCED, l’occupation a empêché le peuple palestinien de mettre en valeur ses ressources pétrolières et gazières dans la bande de Gaza et en Cisjordanie.

Les pertes qui en résultent totalisent plusieurs milliards de dollars, et le développement socioéconomique non réalisé représente un coût de renoncement ahurissant. Plus la situation actuelle se prolongera, plus ce coût sera élevé, de même que les pertes économiques totales supportées par les Palestiniens en raison de l’occupation.

Les multiples chocs budgétaires accélèrent le déclin économique

Dans un contexte déjà marqué par une dégradation sans précédent des conditions socioéconomiques, Israël a adopté en juillet 2018 une loi au titre de laquelle il déduit des recettes douanières de la Palestine un montant équivalent aux paiements versés par l’Autorité palestinienne aux familles des martyrs palestiniens et des Palestiniens détenus en Israël.

En 2019, Israël a donc déduit chaque mois de ces recettes une somme de 11,5 millions de dollars (soit 138 millions de dollars par an). L’Autorité palestinienne a déclaré qu’elle ne saurait accepter rien de moins que le montant total des recettes douanières qui lui reviennent de droit.

Ce bras de fer budgétaire prive la Palestine d’environ deux tiers (65 %) de ses recettes budgétaires, l’équivalent de 15 % de son PIB. L’Autorité palestinienne a fait face à cette situation en procédant à des réductions douloureuses de l’aide sociale apportée aux plus démunis et en ne versant aux fonctionnaires que 50 % de leur rémunération.

Ce choc budgétaire ne fera qu’alourdir encore les incidences négatives du recul de l’aide des donateurs sur la production, l’emploi et les conditions socioéconomiques. S’il se poursuit, le bras de fer budgétaire avec Israël risque fort de plonger l’économie dans une récession et de provoquer l’effondrement financier de la Palestine.

Le coût environnemental de l’occupation

Malgré les nombreuses résolutions de l’ONU, la construction de colonies illégales s’est accélérée en Cisjordanie, et les violences perpétrées par les colons ont atteint en 2018 leur degré le plus élevé depuis 2014.

Ces violences forcent les Palestiniens à quitter leur patrie pour s’installer ailleurs. Israël utilise la Cisjordanie comme une zone à sacrifier, où il envoie des déchets dangereux produits sur son propre territoire, compromettant ainsi la santé, l’environnement et les ressources naturelles du peuple palestinien.

Pendant ce temps, la destruction des infrastructures d’assainissement dans la bande de Gaza a provoqué une catastrophe environnementale.

Chaque jour, plus de 100 millions de litres d’eaux usées non traitées sont déversés dans la mer Méditerranée, d’où une contamination des plages quatre fois supérieure aux limites prévues dans les normes environnementales internationales.

Cette pollution met en péril la santé de la population, fragilise le secteur de la pêche et prive la population des rares possibilités de loisirs abordables que lui offre la mer.

« La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour promouvoir les pratiques industrielles responsables et durables en Palestine et pour protéger la santé du peuple palestinien », a déclaré Mukhisa Kituyi, Secrétaire général de la CNUCED.

Dans son rapport, la CNUCED recommande d’inverser la tendance à la baisse de l’aide apportée au peuple palestinien par les donateurs, ainsi que de poursuivre les recherches visant à définir les droits de propriété et les droits économiques des Palestiniens et à déterminer la part de la Palestine dans les ressources pétrolières et gazières qui appartiennent à plusieurs États voisins de la région.

L’ONU continue d’œuvrer à l’établissement d’un État palestinien indépendant, démocratique, viable et d’un seul tenant, vivant côte à côte avec tous ses voisins dans la paix, conformément à l’ensemble de ses résolutions sur la question.