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Infléchir la courbe : De meilleures politiques commerciales peuvent rompre le lien entre la prospérité économique et les émissions de carbone

08 novembre 2024

Pour réduire les émissions de CO2 tout en construisant un avenir durable, il faut d’urgence prendre des mesures décisives afin de dissocier la prospérité économique et l'accès à l'énergie des émissions de CO2.

Pendant la majeure partie de l'histoire moderne, la production économique et les émissions de dioxyde de carbone (CO2) ont été étroitement liées. Ce n'est que dans les années 1980 que les pays développés ont commencé à « infléchir la courbe », en réduisant leurs émissions de CO2 par habitant tout en maintenant, voire en développant leur économie.

Toutefois, les émissions de CO2 par habitant des pays développés restent plus de deux fois supérieures à celles des pays en développement. Les émissions sont principalement générées par les pays développés et les pays en développement à revenu intermédiaire.

Les économies plus pauvres contribuent peu au total mondial d’émissions - par exemple, les pays les moins avancés en représentent moins de 4 % - mais sont confrontées à des risques plus importants liés au changement climatique et aux catastrophes qui en découlent.

La courbe ne s'infléchit pas assez vite.

L'inégalité flagrante des revenus et des émissions de CO2

Le graphique ci-dessous montre l'évolution de la relation entre le produit intérieur brut (PIB) par habitant et les émissions de CO2 par habitant de 1955 à 2022.

 

Source : UN GCRG - équipe technique, sur la base du Global Carbon Project et de la base de données du projet Maddison.

Note : Produit intérieur brut (PIB) par habitant converti en dollars constants de 2011 en utilisant les taux de parité de pouvoir d'achat. CO2 par habitant en tonnes. L'axe horizontal est en échelle logarithmique. La taille de la bulle indique les émissions annuelles totales de CO2.

Les énergies renouvelables permettent de lutter contre le changement climatique tout en réduisant la pauvreté énergétique

Le développement des capacités des pays à produire de l'énergie renouvelable réduit leur dépendance aux combustibles fossiles et peut réduire de manière significative les émissions de CO2 . En outre, les technologies liées aux énergies renouvelables et leurs solutions hors réseau et en mini-réseau pourraient apporter l'électricité à des millions de personnes qui en sont privées - un facteur clé du développement et de la croissance économique.

Malheureusement, les progrès en matière d'accès aux énergies renouvelables et d'objectif de développement durable (ODD) 7 sont au point mort pour la première fois depuis plus d'une décennie. En 2022, 685 millions de personnes n'avaient toujours pas accès à l'électricité, bien que la grande majorité d'entre elles vivent dans des régions où les ressources en énergies renouvelables sont abondantes.

Les technologies liées aux énergies renouvelables ne devraient pas suivre les schémas commerciaux traditionnels

Entre 2020 et 2022, les cinq premiers exportateurs de produits utilisés dans les chaînes de valeur des énergies solaire et éolienne ont fourni 40 % des exportations mondiales. Cette concentration est particulièrement élevée pour les biens intermédiaires, tels que les plaquettes de polysilicium pour les cellules solaires et les rotors d'éoliennes, dont la production est à forte intensité d'énergie et de capital.

Pendant ce temps, la plupart des pays en développement retombent dans des schémas commerciaux classiques. Alors que la Chine s'est imposée comme l'un des principaux producteurs et exportateurs de technologies liées aux énergies renouvelables, la plupart des pays en développement restent des exportateurs nets de matières premières. En revanche, ils sont importateurs nets de produits manufacturés pour les technologies d'énergie solaire et éolienne, ce qui les prive de précieuses opportunités d'industrialisation durable.

Les coûts élevés de la politique commerciale limitent les opportunités pour les pays en développement

Le rapport « Powering Trade » de la CNUCED montre que les politiques commerciales actuelles sont souvent incompatibles avec les objectifs mondiaux en matière de transition énergétique, d'accès universel à l'énergie et de développement durable.

Pour les pays en développement en particulier, la définition d'une politique commerciale appropriée est un exercice d'équilibre délicat, car les droits de douane constituent également une source de revenus importante. Les droits de douane moyens sur les biens utilisés pour produire des technologies solaires et éoliennes vont de 2,5 % en Asie et en Océanie à 7,1 % en Afrique, les mesures non tarifaires augmentant encore les coûts commerciaux.

Le rapport souligne la possibilité de renforcer l'intégration régionale dans les pays du Sud en s'attaquant aux droits de douane et aux mesures non tarifaires. La réduction des droits de douane intrarégionaux et des coûts de mise en conformité associés aux mesures non tarifaires pourrait permettre de réaliser des économies d'échelle, de promouvoir l'investissement et de renforcer le commerce Sud-Sud. L'abaissement des coûts d'importation des biens intermédiaires aiderait également les pays en développement à entrer dans les chaînes de valeur de l'énergie solaire et éolienne au stade de l'assemblage.

Infléchir la courbe vers des économies prospères et neutres en carbone

Pour inverser la trajectoire des émissions de CO2 et construire un avenir durable, il faut d’urgence prendre des mesures décisives afin de dissocier la prospérité économique et l'accès à l'énergie des émissions de CO2. Il est essentiel d'adopter les énergies renouvelables comme pierre angulaire de l'amélioration de l'accès à l'énergie et de son caractère abordable, d'investir dans des chaînes de valeur diversifiées et de réformer les politiques commerciales pour donner plus de pouvoir aux pays en développement.

En adaptant les politiques commerciales aux réalités de l'urgence climatique, il est possible de libérer tout le potentiel des énergies renouvelables et de favoriser une croissance durable et inclusive.