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CNUCED : la finance peut mettre le commerce en danger, laissant l'économie mondiale « au bord du gouffre » – les pays en développement étant les plus touchés


Communiqué de presse
Pour l'utilisation des médias d'information - Ce n'est pas un document officiel
Traduction non officielle. En cas de divergence, la version anglaise prévaut"
UNCTAD/PRESS/PR/2025/018
CNUCED : la finance peut mettre le commerce en danger, laissant l'économie mondiale « au bord du gouffre » – les pays en développement étant les plus touchés
  • La mondialisation est en train d'être redessinée par la géopolitique et les changements politiques. Le système financier devra s’adapter pour mieux servir les besoins de l'économie réelle.
  • La volatilité des prix constitue désormais un défi permanent pour le commerce, l'investissement et le développement.
  • Les chocs financiers se répercutent rapidement sur l'économie réelle, révélant les lacunes de l'architecture économique mondiale.
  • Les économies en développement sont le moteur de la croissance mondiale, mais elles sont confrontées aux risques financiers et climatiques les plus élevés.
  • Des réformes coordonnées reliant le commerce, la finance, la dette et l'action climatique peuvent rétablir la stabilité et recentrer le développement.

Genève, Suisse, 2 décembre 2025

La croissance mondiale ralentira pour s'établir à 2,6 % en 2025, contre 2,9 % en 2024, alors que le commerce et les investissements mondiaux font face à des pressions accrues en raison de la volatilité financière et de l'incertitude géopolitique, selon le nouveau rapport d’ONU commerce et développement (CNUCED) intitulé « Rapport sur le commerce et le développement 2025 : Au bord du gouffre – Commerce, finance et remodelage de l'économie mondiale ». Le rapport montre que les fluctuations des marchés financiers influencent le commerce mondial presque autant que l'activité économique réelle, impactant ainsi les perspectives de développement à l'échelle mondiale.

La Secrétaire générale de la CNUCED, Rebeca Grynspan, a déclaré que ces conclusions montrent à quel point les conditions financières déterminent de plus en plus l'orientation du commerce mondial. « Le commerce n'est pas seulement une chaine des fournisseurs. C'est aussi un enchainement des lignes de crédit, des systèmes de paiement, des marchés des devises et des flux de capitaux. »

Le commerce mondial a augmenté d'environ 4 % au début de l'année 2025, en partie sous l'effet de l'accélération des importations par les entreprises avant les changements tarifaires, mais aussi dû à des changements structurels : l’expansion du commerce de services est plus rapide, supportée par la croissance de l’économie numérique et l'intelligence artificielle, et aussi par le commerce Sud-Sud dont la croissance est aussi supérieure à la moyenne. Au-delà de ces facteurs, la croissance sous-jacente du commerce est estimée entre 2,5 et 3 % et devrait encore ralentir à mesure que les conditions financières influencent davantage les décisions en matière de production et d'investissement.

Plus de 90 % du commerce mondial dépend du financement bancaire. La liquidité en dollars et les systèmes de paiement transfrontaliers sont également essentiels pour les activités commerciales internationales. Cette forte dépendance à l'égard des canaux financiers rend le commerce très relié aux conditions financières et monétaires mondiales. Une variation des taux d'intérêt ou du sentiment des investisseurs dans un grand centre financier peut avoir une incidence sur les volumes commerciaux mondiaux. Pour les pays en développement, où l'accès à des crédits abordables est limité, ces pressions financières peuvent saper des transactions commerciales qui seraient autrement viables.

Le rapport souligne également le rôle croissant joués par les facteurs financiers sur marchés des produits de base, en particulier dans les systèmes alimentaires essentiels. Pour plusieurs grandes entreprises de négoce alimentaire, plus de 75 % des revenus proviennent désormais d'opérations financières plutôt que du mouvement physique des marchandises.

Les économies en développement sont confrontées à des pressions plus intenses

Les économies en développement devraient connaître une croissance de 4,3 %, soit un rythme nettement plus rapide que les économies avancées. Elles restent toutefois confrontées à des coûts de financement plus élevés, à une plus grande exposition aux fluctuations soudaines des flux de capitaux et à des risques financiers liés au climat de plus en plus importants. Ces facteurs limitent la marge de manœuvre budgétaire et d'investissement nécessaire pour soutenir la croissance.

Le Sud représente plus de 40 % de la production mondiale, près de la moitié du commerce mondial de marchandises et plus de la moitié des flux d'investissement mondiaux. Pourtant, son rôle sur les marchés financiers mondiaux reste limité. À l'exception de la Chine, les pays en développement ne représentent qu'environ 12 % de la capitalisation boursière mondiale et environ 6 % des émissions obligataires mondiales.

En raison de la petite taille de leurs marchés financiers nationaux, de nombreuses économies en développement dépendent d'emprunts extérieurs à des coûts nettement plus élevés. Les taux d'emprunt de 7 à 11 % sont courants, contre 1 à 4 % dans les grandes économies avancées. Ces coûts élevés reflètent souvent des problèmes structurels de l'architecture financière internationale plutôt que les fondamentaux économiques, ce qui réduit les investissements à long terme et ralentit la croissance.

La vulnérabilité au changement climatique s’ajoute aux pressions financières. Les pays exposés de manière répétée à des conditions météorologiques extrêmes paient désormais environ 20 milliards de dollars supplémentaires chaque année en intérêts, car les prêteurs les considèrent comme plus risqués. Depuis 2006, ces primes supplémentaires ont coûté environ 212 milliards de dollars aux économies vulnérables au changement climatique, des ressources qui auraient pu soutenir des investissements sociaux ou à l'adaptation au changement climatique.

La domination du dollar continue d'ancrer la finance mondiale

Malgré la diversification progressive des réserves internationales, le dollar reste au cœur de la finance mondiale. Sa part dans les paiements internationaux via SWIFT est passée de 39 % à environ 50 % en cinq ans. Les États-Unis représentent également la moitié de la valeur boursière mondiale et environ 40 % des émissions obligataires mondiales. Si cela apporte de la stabilité en période d'incertitude, cela lie également les économies en développement à des cycles financiers sur lesquels elles n'ont qu'une influence limitée.

Des réformes ciblées pour rétablir la stabilité et soutenir le développement

La CNUCED présente une série de réformes pratiques visant à réduire la vulnérabilité financière, à améliorer la prévisibilité, et à renforcer l'alignement entre le commerce, la finance et le développement. Le rapport préconise de :

  • Réformer le système multilatéral de règlement des différends commerciaux afin que les règles soient appliquées et que l'incertitude soit réduite.
  • Mettre à jour les règles commerciales pour les adapter à l'économie actuelle, notamment en ce qui concerne les services, le commerce numérique, l'action climatique et les nouvelles stratégies industrielles.
  • Combler les lacunes des données sur les statistiques du commerce et de l’investissement afin de mieux éclairer et coordonner les politiques.
  • Réformer le système monétaire international afin de limiter les fluctuations néfastes des devises et des flux de capitaux.
  • Renforcer les marchés de capitaux régionaux et nationaux afin que les pays en développement puissent obtenir des financements à long terme abordables.
  • Utiliser des outils macroprudentiels (règles visant à réduire les retombées financières négatives) afin de mieux protéger le commerce et les investissements.
  • Améliorer la transparence dans le commerce des matières premières et élargir l'accès à des financements commerciaux abordables, en particulier pour les petites entreprises.

Rebeca Grynspan a déclaré que le rétablissement du lien entre le commerce et la finance était essentiel pour une stabilité durable. « Que faut-il pour une véritable résilience ? Des cadres politiques intégrés qui reconnaissent les liens entre le commerce, la finance et la durabilité. » Elle a ajouté que des réformes coordonnées pouvaient renforcer les perspectives de développement à long terme. « Fondamentalement, nous ne pouvons pas comprendre le commerce indépendamment de la finance. »

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Suivez la présentation du rapport en ligne :

Le Rapport sur le commerce et le développement 2025 sera lancé à Londres lors d’un événement public avec la Secrétaire générale de la CNUCED, Rebeca Grynspan, et la professeure Mariana Mazzucato.

Lieu : University College London (UCL).

Date : 2 décembre 2025 à 17h30 heure locale (Londres)

Format : participation en ligne ou en personne (UCL)

Langue : anglais uniquement

L'inscription est obligatoire pour tout type de participation, en ligne et virtuelle: https://www.ucl.ac.uk/bartlett/events/2025/dec/brink-conversation-rebecca-grynspan-mariana-mazzucato

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À propos d’Onu commerce et développement (CNUCED)

La CNUCED est le principal organe des Nations Unies dans le domaine du commerce et du développement. Fondée en 1964, elle appuie 195 États membres en leur fournissant des analyses et une assistance technique, et elle facilite le dialogue intergouvernemental.

Elle aide ainsi les pays en développement à tirer parti du commerce, du financement, de l’investissement et de l’économie numérique pour parvenir à un développement inclusif et durable.