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Les premières données officielles sur les flux financiers illicites sont désormais disponibles

08 juin 2023

La CNUCED et ses partenaires continuent de travailler avec plusieurs pays en développement pour produire des données officielles sur certains types de flux financiers illicites.

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© Shutterstock/RomanR | Banknotes of various currencies around the world.

L'Afghanistan, le Bangladesh, la Colombie, l'Équateur, les Maldives, le Mexique, le Myanmar, le Népal et le Pérou ont produit les toutes premières estimations nationales des flux financiers illicites (FFI) liés au trafic de drogues, à la traite des personnes et au trafic de migrants, avec le soutien de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

Les estimations sont publiées dans la base de données mondiale des indicateurs des objectifs de développement durable (ODD) de l'ONU. Et un récent rapport infographique de la CNUCED présente des estimations et des conclusions préliminaires sur les FFI fiscaux et commerciaux de 11 pays africains.

La réduction significative des FFI d'ici 2030 est l'une des priorités de l'ODD 16 de l'ONU. La CNUCED et l'ONUDC sont co-responsables de l'indicateur 16.4.1 des ODD, qui mesure la valeur totale des FFI entrants et sortants en dollars américains courants.

Les deux organisations soutiennent les pays dans la production de statistiques transparentes, solides et comparables à l'échelle mondiale sur les flux financiers illicites.

"Ces statistiques sont nécessaires pour mettre en lumière les activités, les secteurs et les canaux les plus exposés aux flux financiers illicites, en indiquant les domaines dans lesquels des actions doivent être entreprises en priorité pour réduire ces flux", a déclaré Anu Peltola, qui dirige le service statistique de la CNUCED.

 

Lutte contre les FFI: l’inaction n’est pas une option

Les FFI peuvent prendre de nombreuses formes et utiliser différents canaux et sont donc très difficiles à suivre et à estimer.

Mais les pays ne peuvent pas se permettre de rester les bras croisés, car les FFI menacent le développement durable. Ils privent les pays de recettes qui leur permettraient d’investir dans des programmes essentiels tels que l'éducation, la santé, l'intégration des femmes et l'éradication de la pauvreté.

En outre, les FFI peuvent alimenter la criminalité organisée et la corruption, ce qui compromet l'État de droit et le fonctionnement des institutions et du système judiciaire.

Par exemple, en Afrique, certains pays où les FFI sont élevés dépensent en moyenne 25 % de moins pour la santé et 58 % de moins pour l'éducation que les pays où les FFI sont faibles, selon un rapport antérieur de la CNUCED.

Les FFI frappent surtout les populations les plus vulnérables du monde 

Les FFI peuvent résulter de diverses pratiques fiscales et commerciales illicites, de marchés illégaux, de la corruption et de l'exploitation, drainant les recettes de l'État et alimentant des activités illégales.

Ils sont directement associés à la violation des droits de l'homme, comme dans le cas de la traite des personnes et du trafic de migrants.

Par exemple, chaque année, des milliers de migrants et de réfugiés mettent leur vie entre les mains dangereuses de passeurs criminels lorsqu'ils fuient la violence, les conflits, la pauvreté et les catastrophes climatiques.

Dans ces cas-là, les migrants doivent payer des sommes considérables à des passeurs pour faciliter leur voyage à travers les frontières, souvent dans des conditions qui mettent leur vie en danger. Un tel fléau génère des flux financiers illicites alarmants.

L'ONUDC estime que le trafic de migrants étrangers en situation irrégulière vers les États-Unis a généré plus de 1,1 milliard de dollars de FFI entrants par an de 2016 à 2018 pour les passeurs basés au Mexique.

Cela équivaut à la valeur des exportations totales de services de transport aérien de passagers du Mexique vers le reste du monde au cours de la même période.

Les énormes profits générés par les FFI issus du trafic de migrants sont probablement réinvestis dans les marchés illégaux, alimentant davantage l'instabilité, la corruption et les activités criminelles dans la région.

Des milliards détournés par le biais des FFI commerciaux 

Les FFI peuvent également être observés dans les activités commerciales. Par exemple, l'étude pilote de la CNUCED montre que les estimations au Burkina Faso ont révélé des FFI dans les exportations d'or entre le pays et l'Ouganda, ainsi qu'avec la Suisse.

En Namibie, l'étude a révélé des estimations préliminaires provenant de la fausse facturation commerciale de 19,6 milliards de dollars de FFI entrants et de 4,7 milliards de dollars de FFI sortants entre 2018 et 2020.

Le Kirghizistan et l'Ouzbékistan ont également fourni des estimations provisoires des flux financiers illicites liés à la fausse facturation commerciale.

Pendant ce temps, de nombreux pays pionniers d'Afrique et d'Asie finalisent leurs premières estimations des FFI fiscaux et commerciaux en vue de les communiquer à la base de données mondiale des indicateurs des ODD de l'ONU d'ici la fin de l’année 2023.

Les pays progressent dans la lutte contre les FFI 

Une récente résolution de l'Assemblée générale des Nations unies a reconnu les progrès significatifs réalisés dans la lutte mondiale contre les FFI, tout en encourageant 193 États membres à communiquer des données sur l'indicateur 16.4.1 des ODD, en utilisant les concepts et méthodes statistiques fournis par la CNUCED et l'ONUDC.

Ces concepts reconnus au niveau mondial et ces méthodes expérimentées contribuent à renforcer les capacités des autorités compétentes en matière de suivi des FFI.

À ce jour, 22 pays pilotes en ont bénéficié, en réunissant les instituts nationaux de statistiques, les douanes, les autorités fiscales, les banques centrales, les cellules de renseignement financier, les organismes chargés de l’application de la loi, les ministères nationaux et les autres organismes clés pour l’analyse des données administratives et des données relatives aux transactions existantes pour le suivi les FFI.

En outre, un projet mondial de renforcement des capacités de quatre ans est en cours, coordonné par la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique (CEA), avec le soutien de la CNUCED, de l'ONUDC et de toutes les autres commissions économiques régionales.

Ce projet soutiendra les pays intéressés à traquer les FFI, à utiliser les estimations pour élaborer des politiques, ainsi qu'à communiquer les données sur l'indicateur des ODD correspondant.

Il est temps d'intensifier la lutte contre les FFI

Dans une récente série d'entretiens exclusifs avec la CNUCED et la CEA, des responsables politiques et des statisticiens et statisticiennes du continent africain ont souligné l'importance de la mesure des FFI.

Théodora Aleka-Laban, qui travaille pour la Commission nationale de lutte contre la corruption et l'enrichissement illicite du Gabon, a envisagé un monde sans FFI.

Mme Aleka-Laban a déclaré que cela permettrait "aux pays africains de financer leur propre politique de développement sans avoir besoin de demander des prêts coûteux et ils seraient en mesure d'atteindre une partie essentielle des objectifs de développement durable".

"C'est l'Afrique que nous voulons, et c'est pourquoi nous luttons contre les FFI", a-t-elle conclu.