Des projets d’ONU commerce et développement démontrent que les secteurs à forte consommation d'eau peuvent passer à une production respectueuse de l'environnement dans des délais courts, tout en soutenant une croissance économique basée sur le commerce.

© ONU commerce et développement/Henrique Pacini | Les effluents industriels d'une usine textile à Lahore, au Pakistan.
a Journée mondiale de l'eau, célébrée chaque année le 22 mars, met à l'honneur cette ressource précieuse, essentielle à la santé publique, aux industries et au développement durable.
Mais à l'échelle mondiale, les systèmes d'approvisionnement en eau sont de plus en plus mis à l'épreuve par la surconsommation, la pollution industrielle et les effets du changement climatique, mettant en péril le bien-être de quelques 2,2 milliards de personnes.
S'attaquant de front à ces défis, ONU commerce et développement (CNUCED) collabore avec des partenaires partout dans le monde pour faire en sorte que la croissance économique et la durabilité puissent aller de pair dans les régions soumises au stress hydrique.
Grâce au programme UNCTAD-SMEP : un programme qui encourage les modes de fabrication durable et la lutte contre la pollution de l'environnement (Sustainable Manufacturing and Environmental Pollution Programme - SMEP), financé par le Royaume-Uni, 27 projets ont pris racine en Afrique et en Asie pour aider à améliorer les processus économes en eau et la gestion des déchets en vue d'une production et d'une consommation durables.
Ces besoins sont particulièrement importants pour le Pakistan, l'un des pays du monde où l'eau est la plus rare, mais qui dépend fortement de l'industrie textile, grande consommatrice d'eau.
« Au Pakistan, l'eau est le produit chimique le plus cher dans les processus de fabrication des textiles », explique Sohail Naqvi du Fonds mondial pour la nature, une agence partenaire du programme SMEP.
Pakistan : L'eau alimente les industries, mais la pénurie et la pollution posent des problèmes
Les données disponibles les plus récentes des Nations unies montrent que le Pakistan a extrait 162 % de ses ressources totales renouvelables en eau douce en 2021, tandis que seulement 38 % des eaux usées domestiques ont été traitées de manière efficace.
Or, l'économie de l'Asie du Sud dépend fortement d'industries à forte consommation d'eau, comme le textile et le cuir, tandis que le coton, l'un des principaux produits d'exportation du Pakistan, nécessite beaucoup d'eau pour la culture et la production de tissus.
Selon une étude d’ONU commerce et développement, ces industries génèrent plus de 17 milliards de dollars par an de recettes d'exportation pour le pays et représentent 60 % de ses exportations de marchandises.
Elles emploient 40 % de la main-d'œuvre industrielle pakistanaise, les tanneries constituant un maillon essentiel des chaînes d'approvisionnement mondiales en cuir.
Une aide concrète apportée par le programme SMEP
Le Sustainable Manufacturing and Environmental Pollution Programme (SMEP), qui vise en partie à réinventer l'économie circulaire du textile, aide le Pakistan à piloter la technologie de distorsion moléculaire - un processus qui peut potentiellement éliminer jusqu'à 98 % des polluants, réutiliser 90 % de l'eau et permettre l'efficacité énergétique grâce à un chauffage intégré à l'énergie solaire.
Elle développe une plateforme numérique qui utilise les données pour révolutionner la gestion et le recyclage des déchets textiles afin de réduire la dépendance et la consommation de matériaux vierges.
Le programme aide également les tanneries - où les peaux d'animaux sont traitées - à adopter une production plus propre et des alternatives circulaires efficaces pour réduire la charge polluante dans les eaux usées.
Parallèlement, un système de traçabilité électronique est testé au Pakistan et au Bangladesh afin d'améliorer la transparence tout au long de la chaîne d'approvisionnement du cuir et de garantir le respect des normes mondiales visant à atténuer la pollution de l'eau par l'industrie.
« Le programme SMEP intègre une production plus propre et des processus économes en eau pour répondre à l'évolution des normes commerciales et environnementales, en visant un accès compétitif au marché et en veillant à ce que la croissance tirée par le commerce s'aligne sur les priorités mondiales en matière de durabilité dans les régions où la sécurité de l'eau est menacée », explique Henrique Pacini, économiste à l'ONU commerce et développement, qui dirige le programme SMEP.
Il est temps de redéfinir la durabilité dans un monde où l'eau est rare
L'expérience du Pakistan reflète des défis plus larges dans les secteurs économiques à forte consommation d'eau en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, où le stress hydrique est élevé et où des solutions durables sont demandées.
Si le renforcement des normes de durabilité peut créer des opportunités de marché, les coûts de mise en conformité, les lacunes en matière de surveillance et les obstacles financiers pourraient limiter l'adoption généralisée d'une production plus propre, en particulier pour les producteurs des pays en développement.
À cet égard, le renforcement de politiques ciblées, des incitants fiscaux et des projets pilotes sont essentiels pour garantir une croissance durable tirée par le commerce.
Par exemple, des outils politiques tels que la responsabilité élargie des producteurs (REP) pourraient transférer la gestion des déchets aux producteurs, tandis que des incitations fiscales et des projets pilotes cofinancés pourraient contribuer à réduire les obstacles financiers à la production durable.
Des normes volontaires de durabilité ou des programmes menés par l'industrie, tels que l'autocontrôle et l'établissement de rapports ou la norme sur les systèmes de gestion de l'environnement (ISO 14001), peuvent également guider l'action.
La manière dont les marchés mondiaux soutiendront ces efforts restera cruciale pour accélérer les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable.
La voie à suivre est déterminante pour l'avenir de la durabilité dans un monde où chaque goutte d'eau compte.