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Une goutte dans l’océan : les marchés du carbone n’ont offert que des financements limités pour les pays les moins avancés

05 novembre 2024

En 2023, la valeur marchande des crédits carbone provenant des PMA était de 403 millions de dollars, soit seulement 1 % de l’aide publique bilatérale au développement.

Bien qu’ils ne soient responsables que de moins de 4 % des émissions mondiales de CO2, les pays les moins avancés (PMA) subissent certains des impacts climatiques les plus graves.

Les marchés du carbone représentent une voie potentielle pour ces économies vulnérables afin de financer leur résilience climatique et leur développement durable, mais générer des revenus significatifs reste un défi.

En 2023, la valeur marchande des crédits carbone provenant des PMA était d’environ 403 millions de dollars, soit seulement 1 % de l’aide bilatérale au développement et bien loin des 1 000 milliards de dollars dont ces pays ont besoin chaque année pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) d’ici 2030.

Ces marchés permettent aux pays d’échanger des crédits carbone – des permis permettant de compenser une quantité donnée d’émissions – offrant aux vendeurs la possibilité de générer des revenus tout en contribuant aux objectifs climatiques mondiaux.

Cependant, la majorité des revenus générés par ces crédits profite à d’autres acteurs, tandis que des obstacles structurels limitent les bénéfices pour les PMA. Leur influence sur ces marchés est restreinte par la petite taille de leurs économies et des défis liés aux infrastructures, à la technologie et aux capacités institutionnelles.

Une activité de marché très concentrée

Les marchés du carbone sont également marqués par une forte concentration géographique. Six PMA seulement – le Bangladesh, le Cambodge, la République démocratique du Congo, le Malawi, l’Ouganda et la Zambie – représentent plus de 75 % de tous les crédits carbone émis sur les marchés volontaires et 80 % des crédits issus du Mécanisme de Développement Propre (MDP) du Protocole de Kyoto.

Bien que les PMA ne représentent que 1,5 % des projets MDP mondiaux, cette concentration met en lumière une opportunité d’élargir leur participation et de développer des marchés du carbone plus inclusifs, profitant à l’ensemble des PMA.

Des opportunités inexploitées dans la sylviculture et l’agriculture

Les PMA disposent d’un important potentiel inexploité dans des secteurs tels que la sylviculture et l’agriculture, capable de générer des crédits carbone équivalents à 70 % des émissions de CO2 de l’industrie aéronautique mondiale en 2019, soit environ 2 % des émissions mondiales totales.

Cependant, entre 2020 et 2023, seulement 2 % de ce potentiel a été exploité, en raison de la faible faisabilité des projets et des prix bas du carbone. Si les prix restent aux alentours de 10 dollars par tonne, 97 % de ce potentiel d’atténuation pourrait rester inexploité d’ici à 2050. Pour que les investissements dans les projets terrestres soient rentables, un prix du carbone de 100 dollars par tonne est nécessaire.

Par ailleurs, les PMA disposent de grandes opportunités pour développer les énergies renouvelables, afin de répondre aux besoins locaux en électricité et d’améliorer l’accès à l’énergie. Les marchés du carbone pourraient contribuer à mobiliser une partie des fonds nécessaires, offrant une voie prometteuse pour exploiter les ressources renouvelables, promouvoir une croissance durable et moderniser leurs économies.

Voie à suivre : recommandations d’ONU commerce et développement (CNUCED)

Des études de cas révèlent que les avantages attendus de la participation aux marchés du carbone – notamment le transfert de technologie, l’éducation et le développement communautaire – restent incertains pour les PMA.

Toutefois, le Rapport 2024 sur les pays les moins avancés, publié le 4 novembre par ONU commerce et développement (CNUCED), souligne que, sous certaines conditions, les PMA peuvent utiliser les projets de marchés du carbone pour soutenir leur développement.

Le rapport propose une feuille de route visant à aider les PMA et leurs partenaires à exploiter pleinement le potentiel des marchés du carbone pour favoriser une croissance durable. Voici quelques-unes des recommandations clés :

Pour les PMA :

  • Établir des cadres politiques indépendants définissant clairement les objectifs, priorités et stratégies d’engagement dans les marchés du carbone.
  • Aligner les politiques des marchés du carbone avec les objectifs nationaux de développement, dans le cadre d’efforts plus larges de transformation structurelle.
  • Renforcer les institutions réglementaires nationales en élaborant des lois, des systèmes de suivi, de notification et de vérification solides.
  • Mettre en place des règles nationales claires pour les opérations des projets carbones et le partage des bénéfices, en précisant les modalités de participation, la répartition des revenus et les réductions d’émissions que le pays hôte conservera.

Pour les partenaires de développement :

  • Renforcer les initiatives de renforcement des capacités, en les adaptant aux besoins spécifiques des PMA en termes de ressources humaines, systèmes réglementaires et capacités institutionnelles.
  • Soutenir l’intégration des politiques de marché du carbone aux stratégies de transformation économique des PMA, en favorisant des approches collaboratives et interinstitutionnelles.
  • Améliorer la confiance, la transparence et l’intégrité des marchés du carbone grâce à l’adoption des principes des Nations Unies pour des marchés crédibles, attendus en 2024.
  • Appliquer le principe des responsabilités communes mais différenciées, en allégeant les exigences pour les PMA et en augmentant les financements dédiés à l’adaptation et au renforcement des capacités.
  • Différencier le financement carbone du financement climatique, pour garantir que les fonds des marchés du carbone s’ajoutent aux engagements existants en matière de financement climatique.

Le rapport souligne que, bien que prometteurs, les marchés du carbone ne peuvent se substituer à l’aide publique au développement ni au financement climatique. Ils doivent être considérés comme un outil complémentaire pour soutenir la transformation verte des PMA et atteindre les objectifs mondiaux de réduction des émissions.