Écrit par: Brahima CISSE, Ngaye TORDINA, Dieudonné KAMArticle No. 11 [UNCTAD Transport and Trade Facilitation Newsletter N°76 - Fourth Quarter 2017]
Les échanges régionaux de produits agroalimentaires jouent un rôle important dans l'intégration régionale et dans la lutte contre l'insécurité alimentaire dans le Sahel et en Afrique de l'Ouest. Avec l'appui financier de l'USAID, le Comité Permanent Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse dans le Sahel (C.I.L.S.S.) a mis en place depuis 2013 un mécanisme de documentation des flux commerciaux de certains produits agropastoraux (céréales, niébé et bétail) et des tracasseries routières auxquels ils sont confrontés sur les principaux corridors routiers d'Afrique de l'Ouest, mentionnés dans le tableau 1. Le CILSS documente aussi actuellement des informations de flux et de tracasseries routières sur le corridor côtier Abidjan-Accra-Lomé-Cotonou-Lagos concernant d'autres produits comme la noix de cola, le poisson, l'oignon, la tomate, les produits maraichers, les fruits et les légumes.
Le CILSS collecte ces données sur plusieurs indicateurs auprès des commerçants, des chauffeurs et transporteurs, en partenariat avec les organisations socioprofessionnelles régionales qui sont appuyées par des Assistants en Gouvernance Routières placés sur des corridors stratégiques de la région. Cette collecte de données se fait suivant une méthodologie d'interview et de remplissage de fiches d'enquête. Ces données collectées et transmises au CILSS chaque mois, sont ensuite analysées et partagées avec plusieurs acteurs (secteur privé, gouvernements, universités, ONG, Banque Mondiale, USAID, Banque Africaine de Développement, CEDEAO, UEMOA, média, société civile, etc.) des marchés nationaux et régionaux à des fins d'information, de sensibilisation et de renforcement de capacités.

La promotion des chaines de valeur agroalimentaires locales permet d'alimenter le marché régional. Mais la circulation de cette catégorie de produits se heurte aux difficultés que rencontrent les acteurs régionaux pour satisfaire aux exigences du schéma de libéralisation des échanges de la CEDEAO sur la libre circulation des personnes et des biens dans la dynamique de l'intégration régionale. Les flux commerciaux sur ces corridors se réalisent sous le poids de nombreux postes de contrôles, des paiements illicites (pots de vins) et du temps perdu sur ces corridors. Ces entraves varient en fonction des corridors et des produits, comme illustré dans la figure 1 et expliqué dans les sections suivantes.

Poste de contrôles par corridor et par produit échangé
Sur l'ensemble des corridors routiers empruntés pour la commercialisation des produits agropastoraux, le corridor sur lequel le nombre de poste de contrôle est le plus important est le corridor Abidjan-Accra-Lomé-Cotonou-Lagos pour les commerçants de produits vivriers et de cola. Il a été dénombré plus de 91 postes de contrôles sur ce tronçon d'environ 1043 Km, soit 9 contrôles aux 100 km. Le second corridor le plus contrôlé est le corridor Koutiala (Mali)-Dakar (Sénégal) pour les commerçants de bétail, mil/sorgho et d'arachide. Sur ce corridor Koutiala (Mali)-Dakar (Sénégal), un camion est contrôlé 65 fois sur un tronçon de 1722 km soit 4 contrôles à chaque 100 km.
Le troisième corridor le plus contrôlé est le corridor Ouagadougou (Burkina Faso) - Accra (Ghana), pour les commerçants de bétail, de tomate et d'oignon. Sur ce corridor Ouagadougou (Burkina Faso) - Accra (Ghana), un camion est contrôlé 44 fois sur un tronçon de 1004 km soit 4 contrôles à chaque 100 km.
Le quatrième corridor qui subit le plus de contrôle est le corridor Bouaké (Côte d'Ivoire)-Niamey (Niger) via le Burkina Faso qui a 39 contrôles sur une distance de 1371 km soit 3 contrôles aux 100 km. Le tableau 2 détaille les informations récoltées au cours de cette enquête. La figure 2 illustre ces informations.


Paiements illégaux (pots de vins) par corridors et par produit échangé
Les prélèvements illégaux observés au courant de cette période de juillet 2017 montrent que la cola sur le corridor Abidjan-Accra-Lomé-Cotonou-Lagos demeure toujours le produit pour lequel les prélèvements illégaux sont les plus importants avec USD5201 par voyage en moyenne soit USD499 aux 100 km.
Il est suivi par le corridor Koutiala (Mali)-Dakar (Sénégal) avec USD586 par voyage soit USD 31 aux 100 km et du corridor Bamako (Mali) - Conakry (Guinée) avec USD 493 par voyage soit USD49 aux 100 km. Les corridors dont les prélèvements n'excèdent pas les USD 200 en moyenne par voyage sont exceptionnellement les corridors Bouaké (Côte d'Ivoire) -Niamey (Niger) via le Burkina Faso, le corridor Ouagadougou (Burkina Faso) - Accra (Ghana).
Le corridor dont les prélèvements illégaux sont en dessous de USD 100 est celui de corridor Sikasso (Mali) - Abidjan (Côte d'Ivoire), avec USD 47 par voyage en moyenne. Le tableau 3 détaillé les informations récoltées au cours de cette enquête. La figure 3 illustre ces informations.


Durée moyenne des temps de contrôle par corridor et par produit échangé
Le temps de contrôles en minutes observé dans les échanges commerciaux met en évidence deux produits : la cola, et le maïs. Comme pour les prélèvements, le temps de contrôle sur la cola est le plus élevé avec 1129 minutes par voyage soit 108 mn aux 100 km, suivi par le maïs avec 214 minutes par voyage soit 16 minutes aux 100 km. Sur le corridor Ouagadougou (Burkina Faso) - Accra (Ghana), 240 minutes de retard ont été observées, soit 24 minutes aux 100 km.
Les corridors où les retards induits sont en dessous de 100 minutes sont: Bama (Burkina Faso) -Kouri (Mali) pour le transport de riz étuvé, et le corridor Sikasso (Mali) - Abidjan (Côte d'Ivoire) Sikasso-Abidjan pour le bétail avec chacun 72 minutes de retards induits en moyenne par voyage.
Le tableau 4 détaille les informations récoltées au cours de cette enquête. La figure 4 illustre ces informations.


Pour plus d'information sur cet article n'hésitez pas à contacter M. Brahima CISSE, Analyste flux transfrontaliers et gouvernance routière, brahima.cisse@cilss.int - cissebra@hotmail.com, Département Accès au marché régional, CILSS.